La révolution digitale ne peut être qu’humaine

Publié le 19 09 2022 | Mis à jour le 24 10 2024

Pendant le mois d’août, nous publions à nouveau quelques-uns des textes les plus lus de l’année écoulée.

La fracture numérique est devenue révolution digitale. Chacun l’appelle plus positivement transformation digitale. Pourtant quel que soit le terme utilisé, les organisations sont aujourd'hui confrontées à une rupture profonde durable et encore difficilement concevable de leur environnement comme dans leurs modes de fonctionnement. Déjà en marche avant la crise du COVID, cette réalité est désormais incontournable puisque confinements et restrictions ont profondément modifié les modes de travail et les modèles de consommation.

Vous avez dit « transformation digitale » ?

Cette transformation – utilisons ce terme puisqu’il fait unanimité – est multidimensionnelle comme rarement cela a pu être dans l’histoire récente. Elle fonde désormais la relation client comme la relation collaborateur puisqu’elle touche l’organisation, la hiérarchie, le pouvoir, la confiance, la performance, les processus, la compétence, l’employabilité, l’utilité économique et sociale, l’éthique même.

Comment anticiper ces phénomènes d’innovation qui quelques mois auparavant semblaient inimaginables ? Chaque « keynote » d’Apple ou d’un autre GAFA apporte son lot de solutions nouvelles, révolutionnaires. Eux-mêmes sont parfois dépassés par la manière dont le client va utiliser leur innovation, lui donnant une nouvelle dimension. Si ces entreprises fondées sur l'innovation sont parfois dépassées, que dire des entreprises classiques dont le mode de fonctionnement semblait immuable, basé sur une organisation de compétences historiques et de hiérarchies déterminées souvent par le pouvoir et plus rarement par le service. 

Une transformation des comportements

Le consommateur ne s’y trompe pas et s’y laissera prendre probablement de moins en moins. Il délaissera peu à peu ces fournisseurs habituels pour en choisir d’autres et cela de plus en plus vite, de manière de plus en plus imprévisible et jamais définitive. Son comportement – notre comportement à tous – a entamé sa mue profonde, nos exigences évoluent de manière imprévue renvoyant au rebut des années d’études marketing et de certitudes universitaires ou managériales.

Ce tableau sombre de la révolution digitale est pourtant le plus probable. La France y est et y sera confrontée de plus en plus, à l’aune de sa transformation largement engagée de l’économie industrielle vers l’économie de services immatériels...et donc « digitalisables » le plus aisément. Par Google art quiconque peut visiter n’importe quel musée au monde, par Uber se passer des services taxés par l’Etat, par Airbnb des meilleurs sites de booking. Tout cela génère une économie non réglementée pesant à côté de l’économie réelle et administrée… une économie humaine. Est-ce pour autant un progrès ? Ce n’est pas évident à constater les conditions de travail des Deliveroo et autres travailleurs de force.

Face à tout cela, l’enjeu le plus considérable est humain, un enjeu bien plus important que les avancées technologiques et même que la refondation de l’expérience client présentée désormais comme l’alpha et l’omega de la transformation digitale.

Avons-nous encore besoin de compétences professionnelles ?

Ce ne sont plus les compétences qui sont remises en cause, c’est leur utilité même. Comparons cette rupture de compétences à la disparition des cochers quand chacun a pu conduire son propre véhicule. Cette métaphore curieuse – j’en conviens – porte pourtant les mêmes caractéristiques. Une compétence ancestrale, indispensable pendant des siècles devient obsolète. Les cochers ne sont pas subitement devenus incompétents...leur compétence est juste devenue sans objet et inutile.

De nos jours, interrogeons-nous sur la compétence du vendeur. Elle est historiquement fondée sur ses savoirs pour convaincre le client. Est-elle encore utile aujourd’hui pour vendre des services immatériels ? Probablement non car le client n’attend plus cela de son interlocuteur. Sur-informé, hyper renseigné et disposant de tous les éléments de comparaison en prix comme en qualité, il n’attend plus le savoir du vendeur mais son savoir-faire pour le réassurer. Pire, le client est capable à tout instant de remettre en cause les connaissances et le discours du vendeur car il peut en contrôler les éléments instantanément.

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