La facilitation numérique pour les usagers de la ville de Paris

Publié le 19 09 2022 | Mis à jour le 06 11 2024

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Fabrice Beaulieu, directeur du programme « Compte parisien », nous explique sa composante de « facilitation numérique ». Ce dispositif d’appui à l’utilisation des services numériques, proposé aux usagers de la Ville de Paris dans leur mairie d’arrondissement, a été examiné par la formation spécialisée « Qualité de l’information administrative » du COEPIA en avril, dans le cadre de ses travaux sur l’inclusion numérique des usagers.

En quoi consiste la « facilitation numérique » ? Pourquoi la Ville de Paris a-t-elle lancé ce chantier pour ses usagers ?



F.B. : La facilitation numérique est un dispositif d’appui à l’utilisation des services numériques, qui est offert aux usagers de la Ville de Paris dans leur mairie d’arrondissement. Concrètement, des agents accompagnent les usagers dans la recherche d’informations sur paris.fr (le site internet institutionnel), l’utilisation de téléservices de la Ville, et même ceux de certains autres services publics comme la CAF. Depuis octobre 2016, une phase pilote a été ouverte dans quatre mairies (2e, 4e, 12e et 17e arrondissements) : suite au succès rencontré, le dispositif sera déployé sur tout Paris au second semestre 2017.



La mise en place de la facilitation numérique poursuit trois objectifs. En premier lieu, il s’agit de répondre aux attentes des usagers, qui considèrent que leur mairie d’arrondissement est le lieu privilégié de leur interaction avec la Ville : ils admettent de moins en moins d’avoir à se déplacer dans des guichets spécialisés éloignés de leur bassin de vie. Tous les guichets ne pouvant être présents dans chacun des arrondissements, la digitalisation donne l’opportunité de répondre à cette demande, en rapprochant les services de l’usager. Mais naturellement, tout le monde n’a pas la même facilité d’accès au digital. La Ville a donc souhaité – c’est le deuxième objectif – que les publics les plus fragiles soient accompagnés dans cette évolution, qui ne doit laisser personne de côté. Le rôle premier des facilitateurs est donc d’identifier les besoins spécifiques des visiteurs, afin d’y répondre de façon personnalisée. Les « personas » créés par le SGMAP [Secrétariat général pour la modernisation de l’action publique] nous ont servi de base pour décliner notre prestation, et en particulier l’adapter à celles et ceux qui sont le plus en marge du monde numérique. Pour d’autres profils plus rapidement autonomes, l’exercice consiste davantage à faire découvrir le catalogue de l’offre digitale de la Mairie de Paris, et à le promouvoir. C’est le troisième objectif du dispositif.



Comment associez-vous et formez-vous les agents de la Ville, y compris les moins familiers du numérique ?



F.B. : L’association très étroite des agents est l’une des clés fondamentales de succès de la démarche. Depuis le départ, nous nous sommes attachés à avoir une communication très opérationnelle, sous forme de réunion d’information dans les mairies pilotes. Les équipes ont été associées à la conception du dispositif, et accompagnées tout au long de sa mise en œuvre. Des groupes d’échange ont été mis en place, permettant aux personnels des différentes mairies de se rencontrer, de partager leurs pratiques et de préparer l’évolution de leur métier. Les opérationnels ont également été au cœur du retour d’expérience organisé à l’issue de la phase pilote. Nous avons volontairement testé quatre configurations différentes dans chacune des mairies d’arrondissements, afin de pouvoir comparer les équipements choisis, l’emplacement dans les locaux, et même l’organisation mise en place autour du dispositif. Au-delà de l’adhésion des équipes, la participation des agents à cette évaluation nous a guidés dans la conduite du projet : l’expérience du terrain est la meilleure des boussoles.



Concernant la formation, une action spécifique a été mise en place, en deux volets : le premier accompagne les agents dans l’appropriation de ce qui constitue un nouveau rôle et un nouveau positionnement par rapport à la relation plus traditionnelle derrière un guichet ; le deuxième a pour objet la maîtrise de l’utilisation des services numériques eux-mêmes. Les formations comprennent beaucoup de mises en situation pratiques. Elles ont permis, en parallèle de l’accompagnement offert aux agents par l’équipe projet du Secrétariat général sur site les premières semaines, de rassurer et de motiver les agents dont certains n’étaient pas à l’aise avec le numérique, ou avec ce changement de rôle vis-à-vis de l’usager. Notre plus grande satisfaction est de les entendre aujourd’hui dire que nous les avons accompagnés dans l’évolution de leur vie professionnelle, en valorisant et en donnant des perspectives d’avenir au métier de l’accueil.

Les usagers parisiens sont-ils associés ou consultés pour la définition de cette nouvelle offre de service ?



F.B. : Les usagers sont consultés à chacune des grandes étapes clés du programme « Compte Parisien », dans le cadre duquel a été mise en place la facilitation numérique. Nous réunissons des panels d’usagers, sous forme de focus groups ou d’entretiens individuels. Nous considérons que ces modalités sont aujourd’hui nécessaires à une démarche de création de services dans le secteur public. Sur la facilitation numérique plus spécifiquement, nous avons procédé à une série d’entrevues sur le terrain, à l’issue d’actions d’accompagnement des usagers. Ceux-ci ont témoigné une satisfaction importante sur le dispositif. Au-delà même de la manipulation digitale, les utilisateurs ont souligné l’aspect rassurant de la présence d’un agent à leur côté pour valider à la fois le volet numérique de leur démarche, mais aussi leur bonne compréhension de son volet « métier ». C’est également un enseignement intéressant pour nous : notre accompagnement doit porter à la fois sur le numérique et sur les démarches administratives. Les deux se confondront de plus en plus avec le temps.



Quels sont les enseignements de la phase expérimentale et quelles conclusions en tirez-vous ?



F.B. : La comparaison entre chacune des configurations testées en phase pilote nous a permis, en collaboration avec un ergonome, de choisir notre cible pour la phase de généralisation au second semestre 2017. Nous mettrons en place un dispositif socle, composé d’un écran tactile, associé à un clavier et une souris, pour que l’accompagnement s’adapte aussi bien aux utilisateurs de tablette que d’ordinateurs fixes. Il sera positionné sur un mobilier modulable pouvant à la fois offrir une configuration debout et une configuration assise : pour les usagers à mobilité réduite notamment. Ce socle sera complété, dans plusieurs mairies, par un dispositif « double écran / double clavier / double souris », en position assise. Il sera destiné aux populations qui, en raison de la complexité de leur dossier ou de leurs besoins d’accompagnement plus importants, nécessitent une prise en charge plus longue et plus personnalisée. Le retour d’expérience a enfin permis de consolider les autres aspects de la gestion du projet, des plus stratégiques aux plus opérationnels : par exemple, la participation de tous les services de la mairie (non limités à l’accueil général) sera privilégiée, afin de favoriser la dynamique d’ensemble.

Le programme « Compte parisien »

La facilitation numérique constitue l’une des composantes du programme « Compte Parisien », qui rassemble cinq projets de modernisation de la relation entre la Ville de Paris et ses usagers. Le programme comprend également la création d’un compte de connexion unique, qui permettra progressivement de se connecter à tous les services numériques parisiens, ainsi que de déposer données et pièces justificatives dans un espace personnel pour une réutilisation ultérieure (dans le cadre du « Dites-le nous une fois »). Le programme a également pour objectif l’harmonisation de l’accès aux services de la Ville, quel que soit le canal utilisé (digital, téléphonique, physique) : charte graphique commune pour les services numériques, généralisation de la prise de rendez-vous, envoi d’un suivi des demandes, etc. … Enfin, un outil de gestion de la relation usager (« GRU ») a été développé : il permet à la fois de gérer les demandes d’information et réclamations des usagers en cross canal, de consolider le processus d’escalade auprès d’experts dans les directions opérationnelles, et de piloter de façon plus précise la performance de la relation usager : délais de réponse aux sollicitations adressées à la Mairie, ventilation entre les différents canaux relationnels, etc. … Ouvert en mars dernier sur un périmètre pilote, l’outil de GRU sera généralisé en juin 2017.